Paroles et traduction de la chanson «Mimoun, Fils De Harki» par Mickey 3D

Mimoun, Fils De Harki

Mickey nous sort la grosse artillerie, du bon tragique moderne. Préparez les mouchoirs, on est en plein cliché : l'immigré qui travaille à l'usine, qui se fait rejeter par les autres et qui, comble du comble, veut se suicider. Mais le problème, c'est que, bien plus qu'un cliché, il s'agit d'une réalité. Les clichés sont devenus agaçants, c'est du réchauffé aujourd'hui, dans notre société d'information. Ce sont bien des stéréotypes, mais des stéréotypes de problèmes sociaux, voire humains, que l'on a pas résolu. Et quand on a bien ému la ménagère de moins de 50 ans devant son téléviseur en lui montrant les petits Africains qui meurent de faim, il n'y a vite plus rien à en tirer. Alors on n'en parle plus. Et pourtant il y a toujours des petits Africains qui meurent de faim. Voilà le plus grand de tous les tragiques : on pleure devant nos télés un moment, puis quand le filon est bien exploité, on n'en parle plus ; on préoccupe l'opinion publique avec autre chose. Savez-vous, par exemple, que les atrocités continuent au Darfour ? Pourtant il y a bien longtemps que le JT n'en parle plus ; ça se vend trop mal. Alors on oublie.

Rentrons un peu plus précisément dans le texte : Mickey soulève ici les principaux problèmes sociaux :

Problème du fordisme, du travail à la chaîne qui n'offre aucun épanouissement intellectuel possible et qui en outre menace la santé des travailleurs (et on peut même aller plus loin en disant que les travailleurs à la chaîne sont condamnés au chômage avec la mécanisation des chaînes de montage) :
il va pointer dans l'usine où ça sent pas bon, où tout le monde fait que de tousser

Problème d'intégration sociale (problème spécifiquement français)... C'est un véritable cercle vicieux dans la mesure où quand on est exclu par les autres, on n'a pas envie de faire des efforts pour s'intégrer... Le problème est bien celui de l'oeuf ou la poule : quelle est la cause première ? En gros, qui est "fautif " ? Y'en a-t-il seulement un ? Il est facile de rejeter la faute sur autrui, mais un tel cercle ne peut pas se briser si facilement...
il est pas français, il aurait bien aimé pourtant mais les gens font que de l'éviter
Et au passage, petite dénonciation de la société de la peur : toute société a besoin d'un ennemi (pour assurer l'obéissance des citoyens, et la cohésion sociale : on a besoin d'un ennemi commun pour se serrer les coudes, être dociles), alors on comble notre manque de guerre en se vengeant sur l'Immigré (aujourd'hui, les Arabes, mais hier, c'étaient les Roumains, et après la guerre, c'étaient les Italiens : Même le racisme a ses modes. ) On le montre à la télé, pauvre, sale, voleur si possible. En plus, l'immigré, c'est pratique pour les policiers, ça leur donne une occasion de faire des statistiques bien propres car un Noir ou un Arabe dont un contrôle les papiers, c'est une affaire traitée et une affaire résolue : du 100% de résolution assuré, ça permet de faire baisser artificiellement les taux de délinquance (la fameuse méthode Sarkozy) Et ça donne :
un étranger qui fait peur à la ménagère et qui occupe les policiers

Ensuite, je vais essayer de pas trop rentrer dans les détails : problème d'argent qui force les enfants à partir travailler à l'usine au lieu de faire des études (on appelle ça la reproduction sociale dans toute sa splendeur, cercle vicieux qui fait que les pauvres sont condamnés à rester pauvres), et également, évidemment, problème de l'individu qui est totalement dépassé par sa vie, dans laquelle il ne s'épanouit pas, et dont il cherche à s'évader par tous les moyens. La plupart des gens préfèrent l'alcool ou la drogue, mais notre pauvre Mimoun est tellement désespéré qu'
Il imagine qu'il est déjà mort, c'est sa façon de s'évader

Mimoun, il fait des trous dans des cartons

Tous les matins il va pointer

Dans l'usine où ça sent pas bon

Où tout le monde fait que d'tousser

Il sait pas très bien d'où il vient

Tout ce qu'il sait c'est qu'il est pas français

Il aurait bien aimé pourtant

Mais les gens font que d'l'éviter

Alors il reste planté là

Raconte des trucs à la fraiseuse

Qui lui dit "Mon gars t'arrête pas"

Mimoun il a bientôt 40 ans

Mais il est toujours chez sa mère

C'est parce qu'elle est un peu malade

Depuis qu'elle a perdu son père

Et comme c'était lui le plus grand des fils

Il est parti bosser

A l'école, il s'débrouillait bien

L'aurait bien voulu continuer

Comme si la vie s'était posée sur lui

En lui disant "Toi tu bouges pas

Les trucs jolis c'est pas pour toi"

Mimoun il imagine qu'il est déjà mort

C'est sa façon de s'évader

Et comme il y croit plus très fort

Il dit qu'un jour il va s'tailler les veines

Plutôt que de s'en aller

Pour être ailleurs un étranger

Qui fait peur à la ménagère

Et qui occupe les policiers

Alors il reste planté là

Raconte des trucs à la fraiseuse

Qui lui dit "Mon gars t'arrête pas"

Comme si la vie s'était posée sur lui

En lui disant "Toi tu bouges pas

Les trucs jolis c'est pas pour toi"